L’abattage non réglementé a encore de longues années de vie devant lui

L’abattage traditionnel des volatiles au Maroc, a encore de longues années de vie devant lui. Malgré la publication de nouvelles lois et règlements, les Riacha (unités d’abattage et de plumaison manuelle et traditionnelle) imposent toujours leur propre loi sur le circuit commercial des viandes blanches. Les 23 abattoirs industriels agrées continuent à payer les frais d’une concurrence déloyale. Selon les associations de cette filière, moins de 10% de la production nationale sont traités par les unités de l’abattage contrôlé.
L’Association nationale des abattoirs avicoles (ANAVI), qui regroupe les 23 unités modernes d’abattage industriel et de transformation des viandes blanches, a publié récemment des statistiques qui indiquent que seuls 8% de la production nationale de la viande blanche sont contrôlés et abattus conformément aux normes internationales d’hygiène. En réaction à ces informations, la Fédération marocaine des droits des consommateurs (FMDC) n’a pas cessé de tirer la sonnette d’alarme sur ces anomalies qui portent atteinte à la santé du consommateur avec la présence dans le circuit de distribution de produits avicoles insalubres et impropres à la consommation. Pour son président, Kherrati Bouazza, « Il est intolérable » que les Marocains consomment 92% de viandes blanches provenant d’un abattage clandestin ou non conformes aux règles d’hygiène. « C’est un pur dénigrement, dit-il, des droits du consommateur en dépit de toutes les lois en vigueur, de celle de la répression des fraudes (13-83) jusqu’à la loi sur la Sécurité sanitaire des produits alimentaires (28-07)».
Dans la majorité des pays développés ou même similaires au nôtre (comme la Tunisie), relève-t-il, toutes les viandes blanches produites sont abattues, préparées et contrôlées au niveau des abattoirs avicoles agrées.
De ce fait, ces établissements jouent un double rôle protecteur. Ils garantissent l’accès du consommateur à une viande de qualité et permettent de stabiliser les prix avec l’organisant des productions en amont et la bonne maîtrise de gestion de la distribution en aval.
De ce fait, la FMDC condamne fermement ces anomalies et exhorte le gouvernement à se pencher sérieusement sur les mesures nécessaires à prendre pour mettre un terme à l’anarchie qui règne dans le circuit de commercialisation des produits avicoles et d’assurer la protection du consommateur et de sa santé.
Pour le président de la Fédération, la responsabilité incombe aussi bien aux autorités de tutelle, qu’aux commerçants qui ne respectent pas la loi et aux consommateurs qui acceptent tout bonnement, l’achat d’un produit issu d’un circuit non contrôlé.
Depuis l’introduction du poulet blanc au Maroc, et en l’absence d’unités d’abattage avicoles modernes, les « Riacha » (boutique d’abattage et de plumaison manuel et traditionnel) ont profité du vide juridique qui existait à l’époque, pour proliférer et prospérer partout dans le pays.
Vu leur nombre qui s’est accru de manière exponentielle durant les dernières décennies, les propriétaires de ces milliers de tueries traditionnelles constituent désormais une force réfractrice au changement et à la modernité. Pour les autorités sanitaires et sécuritaires, la restructuration de ce circuit de commercialisation « hors-la-loi » à l’instar des autres secteurs du commerce informel, posent avant tout un grand problème social difficile à résoudre. «Sur le plan légal, l’article 17 de la loi 49-99 relative à la protection sanitaire des élevages avicoles, au contrôle de la production et à la commercialisation des produits avicole dispose que “le commerce simultané, dans un même local, de volaille vivante et des viandes de volaille est interdit», affirme un responsable de l’ONSSA (Office National de sécurité Sanitaire des Produits Alimentaires). Comme on peut le constater, bien des lois et des règlements existent, mais leur application est loin d’être acquise.
Pour remédier à cette situation, une circulaire relative à l’autorisation des unités d’abattage de proximité a été transmise en 2007 aux départements concernés,  pour la conversion des «Riacha» en unités d’abattage de proximité répondant aux exigences sanitaires et hygiéniques minimales requises, mais en vain. Cette injonction n’a reçu à la date d’aujourd’hui,  qu’une faible adhésion des propriétaires des «Riacha». Donc un projet d’une nouvelle circulaire dans le cadre du programme «Rawaj » a été élaboré et est actuellement à l’étude par les départements de l’agriculture, de l’Intérieur et de l’Industrie, du commerce et des nouvelles technologies.
Ce projet offre un cadre incitatif devant conduire à la reconversion des «Riacha» en un abattage de proximité réglementé et prévoit un accompagnement des propriétaires et un contrôle sanitaire par les autorités compétentes.
Vus les gros risques que représente une telle anarchie pour la santé des citoyens, les autorités de tutelle vont finir bien par trouver les moyens coercitifs à même de faire appliquer fermement les lois aux récalcitrants et récidivistes afin d’assurer une meilleure protection du consommateur.
En attendant, l’abattage non réglementé demeure le maillon faible de la filière, en raison notamment de la vente simultanée du poulet vif et des viandes préparées, de la forte concurrence des abattoirs artisanaux (Riacha) et du faible volume de volatiles vifs traités par les abattoirs industriels. Face à cette concurrence déloyale, les 23 abattoirs industriels continueront à tourner à moins de 20 % de leurs capacités réelles, et le consommateur sera encore mal servi en espérant qu’un jour la règlementation de la profession sera mise en application telle que prévu par la loi.

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