Les Marocains ont développé la plupart des filières de l’aviculture mais continuent à bouder l’élevage de l’autruche, pourtant une niche rentable et très prometteuse. Ont-ils peur de se risquer dans cette filière encore ignorée par la tradition culinaire, ou c’est le prix de vente du produit final se situant actuellement dans la fourchette de 100 à 160 DH/kg, qui dissuade les éleveurs de se lancer sur ce créneau ? Au Maroc où on a introduit avec succès la culture de nombreux fruits exotiques, et où la dinde, qui était pourtant au début difficile à introduire sur le marché, a fini par bien se positionner aux côtés du poulet, les conditions climatiques et d’élevage de l’autruche s’y prêtent favorablement. La disponibilité du terrain, la longue expérience de l’aviculteur marocain et sa technicité et son savoir-faire qui n’ont nul besoin d’être prouvés, autrement dit, toutes les conditions sont réunies pour le développement de ce créneau qui peut s’ouvrir même à l’export. La viande de ce volatile est très prisée en Europe, en Asie, en Amérique et même en Afrique noir. En Israël on pratique un élevage intensif destiné en gros à l’export. Le Japon, à lui seul, importe chaque année l’équivalent de 80 tonnes de viande et 2.000 m² de cuir d’autruche. Selon les études disponibles, dans les conditions climatique qu’offre le royaume, l’autruche peut pondre jusqu’à 70 œufs par an et fournir après 30 mois de vie, 200 à 300 kilos de viande très riche en protéines avec un faible taux de cholestérol et très peu de résidus d’antibiotiques. Selon les rares éleveurs marocains qui ont été tentés par l’expérience dans la région de Casablanca, de Témara et du côté de Dakhla, au bout des 10 premiers mois, l’autruche peut atteindre facilement les 100 kg. En plus, la peau de cet oiseau offre un des cuirs les plus appréciés par les artisans et fabricants des articles en cuir. Sa peau serait même plus cotée que celle du crocodile. Son plumage et ses œufs constituent une source de revenu supplémentaire. Sur le plan rentabilité, l’élevage d’autruche rapporte, selon des experts chinois, mieux que les autres volailles ou bétails.
Les premiers spécimens de reproducteurs éprouvés ont été importés du Portugal au début des années 2000, par un éleveur casablancais.
L’autruche est polygame : généralement, le mâle vit en enclos avec deux femelles. Le processus d’incubation proprement dit dure 42 jours. Après leur naissance, les autruchons sont engraissés pendant huit à dix mois à l’aide d’aliments composés d’orge, maïs, tournesol, son de blé et luzerne, fabriqués sur place. Après cette phase, les autruchons atteignent leur maturité et sont alors prêts pour l’abattage.
Si en Europe, la viande d’autruche rencontre un franc succès, chez nous au Maroc elle peine encore à s’imposer en tant que produit de masse comme le poulet ou la dinde, en raison de la réticence des traditions gastronomiques de chez nous. A présent, seuls les restaurateurs (70%) et les grandes et moyennes surfaces de distribution (30%) la commercialisent.
La consommation de la viande de ce volatile qui était de 2,8 tonnes en 2003, actuellement elle ne dépasse guère les 10 tonnes par an, au prix moyen oscillant entre 100 et 160 DH/kg. A ce prix qui surpasse de loin celles des autres volailles et des viandes rouges, la viande d’autruche, reste relativement élevé pour la bourse d’un Marocain moyen.
Pour l’histoire, au début du XXe siècle, ce gros volatile vivait encore à l’état sauvage dans la région sud du Maroc. L’espèce dite «cou rouge» se reproduisait tranquillement dans le désert avant d’être entièrement décimée par les colons chasseurs.
Si l’élevage parfois intensif, de l’autruche s’est développé de manière remarquable dans de nombreux pays du pourtour méditerranéen, tels que l’Espagne, le Portugal, le sud de la France, la Tunisie ou Israël, pourquoi pas le Maroc ?
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